Intervenant sur la radio RFI, l’économiste sénégalais Ndongo Samba Sylla a indiqué qu’il est « souhaitable » que les pays de l’AES aient leur propre monnaie. Cette prise de position intervient alors qu’enfle le débat sur la sortie du franc CFA du Burkina, du Mali et du Niger.
Le 28 janvier dernier, le Mali, le Burkina et le Niger ont annoncé simultanément leur sortie de la Communauté ouest-africaine, Cedeao. Ce retrait qui renforce l’Alliance des États du Sahel (AES) formé par ces trois pays, préfigure la création d’une monnaie propre à cette alliance. Un tel scénario équivaut donc à la sortie de ces pays de la zone franc CFA.
Nécessité de sortir du franc CFA
Dans son intervention, M. Samba Sylla a relevé une particularité des pays francophones qui consiste à croire que « battre monnaie c’est quelque chose de miraculeux ou d’extrêmement dangereux ». Selon ses recherches, « moins de 7% de la population mondiale évolue dans une union monétaire ». Ce qui signifie que la plupart des pays du monde ont leur propre monnaie.
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Aussi, il est « possible » voire « souhaitable » pour l’AES de sortir du franc CFA parce que cette monnaie « impose un déficit de financement de l’économie mais aussi une surévaluation du taux de change ». Dans la pratique, la mise en œuvre de la zone de libre-échange africaine (Zlecaf) va balayer les pays CFA parce que le taux de change est surévalué. Prenant l’exemple du Niger, l’économiste a indiqué que selon les données de la Banque mondiale, le meilleur niveau de revenu réel par habitant remonte à 1965.
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Cette tendance est généralisée à tous les autres pays de la zone. Alors qu’en tant que pays producteur de pétrole, il serait profitable de fixer sa monnaie au dollar plutôt qu’à l’euro. Au monde, c’est seulement dans la zone CFA, qu’on trouve des pays producteurs de pétrole et gaz qui fixent leur monnaie à l’euro dans le monde, s’est-il désolé. Toutefois, battre monnaie n’est pas forcément la panacée, nuance l’économiste sénégalais.
La monnaie « est juste un instrument », indique le chercheur. Si le modèle économique est néolibéral, extraverti, « ça ne changera pas la donne ». Au contraire, quand le modèle est « plus endogène, qui parte de la mobilisation des ressources domestiques (…) et que la dépense publique est bien faite », et que les endettements sont prudents, « la monnaie peut être au service du développement » a conclu M. Samba Sylla.
Pour rappel, Ndongo Samba Sylla est un économiste et champion de scrabble. Il est auteur d’un livre, co-auteur de deux autres avec Fanny Pigeaud, dont un sur le franc CFA. Il est très engagé contre cette monnaie.
La Rédaction