Coup d’État au Niger : vers une nouvelle coopération africaine avec la Russie !

Coup d’État au Niger - vers une nouvelle coopération avec la Russie !

Le coup d’État au Niger, le quatrième de ces trois dernières années en Afrique francophone, ne peut être appréhendé hors du contexte des luttes pour l’émancipation de l’Afrique. Les pays récemment passés entre les mains de militaires ont engagé une rupture avec la France, perçue comme l’écueil à leur envol. 

C’est tard dans la nuit de mercredi qu’on a connu l’épilogue du prétendu « mouvement d’humeur » de certains militaires, qui a débuté très tôt le même jour au Niger. Devant les caméras de la télévision nationale et à travers le monde entier, un groupe de militaires a annoncé la destitution du régime du président Mohamed Bazoum, élu il y a un peu plus de deux ans. Sous le nom de Conseil National de la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), le nouvel organe s’engage à diriger le pays dans une voie qui n’est pas encore dévoilée, mais différente de celle de M. Mohamed Bazoum.

Une présence française qui passait mal

Le coup d’État du mercredi 26 juillet au Niger était craint par plusieurs observateurs de la vie politique du Niger. Pour beaucoup, la main tendue du président Bazoum aux forces françaises et européennes chassées d’ailleurs pourraient lui être préjudiciable. En effet, en avril 2022, le parlement nigérien a voté la proposition du gouvernement de modifier la Déclaration de politique générale (DPG), permettant l’installation des forces françaises Barkhane et Takuba en partance du Mali.

Niger: l’armée annonce la destitution du président Mohamed Bazoum

Ce vote avait énormément divisé l’opinion nationale. La société civile avait initié différentes actions pour empêcher l’arrivée de nouvelles forces françaises dans le pays, sans résultat. Cet évènement est venu ouvrir la plaie déjà béante laissée par le convoi de la force Barkhane, bloqué à Téra en novembre 2021. En effet, un convoi de Barkhane parti d’Abidjan pour rejoindre Gao au Mali, avait été bloqué au Burkina-Faso, puis dans l’ouest du Niger, a Téra.

Trois des manifestants qui bloquaient les véhicules ont été tués par des tirs imputés par le gouvernement nigérien, à ses forces ou aux forces françaises. Mais l’enquête conjointe menée par les deux pays n’a pas permis de déterminer qui a tué les manifestants. Ces évènements étaient assurément restés au travers de la gorge des nigériens. A cela s’ajoutent les attaques terroristes qui se sont multipliées cette année malgré la présence des bases militaires françaises au Niger et le redéploiement sur le pays du dispositif militaire français au Sahel.

Porte ouverte à la Russie !

Les militaires nigériens, premières victimes des attaques terroristes, avaient sûrement une autre lecture de ce problème et ses voies de règlement autre qu’à travers la coopération avec la France. On en veut pour preuve, la visite du chef d’état-major de l’armée nigérienne, le Général de division Salifou Modi, au Mali le 09 mars 2023. Lors de sa rencontre avec son homologue malien, le Général Oumar Diarra, ont été évoquées les moyens de « rentabiliser davantage » la coopération entre les deux armées. Il a ensuite transmis ce message au président de la transition malienne, le Colonel Assimi Goïta.

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Mais cette option de coopération ne prospéra pas puisqu’un mois après, le Général Modi a été limogé par M. Bazoum. En tant que chef d’État-major de l’armée nigérienne, le Général portait sûrement les aspirations de l’armée, qui apparemment sont contraires à celles du président Bazoum. Beaucoup d’ingrédients étaient donc réunis pour chasser le président Bazoum de l’estime d’une bonne partie de sa population mais aussi de son armée.

Le fait de déclarer dans une interview à Jeune Afrique en mai que « les terroristes d’Al-Qaïda et de l’État islamique sont plus aguerris que nos armées » n’a sûrement pas fait monter M. Bazoum dans l’estime des militaires nigériens. Le CNSP, lors de l’annonce du renversement du président nigérien ce mercredi, a justifié son coup par « la dégradation continue de la situation sécuritaire et la mauvaise gouvernance économique et sociale ».

Les développements faits plus hauts prouvent que le désormais président déchu avait fait l’option de la coopération militaire française pour assurer la sécurité, ce qui n’a pas empêché sa dégradation dénoncée par les putschistes. On peut donc prévoir que ces derniers vont faire le choix d’autres coopérations notamment avec la Russie, qui a le vent en poupe sur le continent. D’autant plus que sous le Général Modi, l’armée nigérienne avait sollicité une coopération avec le Mali, qui depuis qu’il est dirigé par des militaires, s’est tourné vers la Russie.

Esso ASSALIH