Niger : « Ce n’est pas la Cédéao qui fera une intervention » militaire, avertit le Dr Folly Gada, enseignant-chercheur à l’Université de Lomé

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Jamais un coup d’État en Afrique de l’ouest n’a suscité autant de réactions menaçantes de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cedeao). Cette dernière envisage toujours une intervention militaire contre le Niger, une première ; et pour le Dr Folly Gada, cette aventure est commanditée par des puissances au-dessus de la Cédéao qui ont des intérêts vitaux au Niger.

La Cedeao avait donné un ultimatum de 7 jours au Niger pour rétablir l’ordre constitutionnel, faute de quoi elle interviendrait militairement pour libérer le président déchu Mohamed Bazoum. Ce délai expiré, l’organisation n’a cependant pas mis en œuvre sa menace, confrontée à la réticence de plusieurs acteurs étatiques notamment au Nigéria. Cependant cette menace plane toujours et une réunion se tient ce jeudi.

Des puissances derrière la Cedeao

Invité sur la radio Victoire Fm à Lomé ce matin, l’historien Ekoué Folly Gada, enseignant-chercheur dans les deux Universités publiques du Togo est revenu sur la crise au Niger. Le Dr s’est étonné de ce que des activistes africains minimisent la menace d’intervention militaire de la Cédéao au Niger. Pour lui, la Cedeao est une institution écran, qui n’est pas autonome et les menaces venant d’elle ne sont pas à banaliser. Parce que ce n’est pas elle qui fera une intervention.

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En effet, « la Cedeao n’a pas des intérêts pour intervenir au Niger » et elle n’en n’a pas non plus les moyens, souligne l’enseignant-chercheur. Ces chefs d’État qui menacent « constituent un écran » explique-t-il. « La Cedeao est un instrument qui fait à la place d’autres (…) Il y a donc des puissances qui ont des moyens et qui à travers le paravent de cette institution sous-régionale peuvent agir ».

Toutefois, nuance le Dr Folly Gada, la Cedeao n’est pas un valet permanent. Il y a des questions sur lesquelles elle dit non et des questions sur lesquelles elle ne peut pas dire non. Cependant, ce qui se prépare contre le Niger est « une guerre de haute intensité qui dépassera ce qui se passe en Ukraine » et les populations qui manifestent ne pourront l’empêcher. Si cette guerre éclate avertit l’enseignant, il y aura des déplacés dans tous les pays africains, puisque le Niger a des frontières avec 7 autres pays.

Les intérêts européens au Niger vus par Dr Folly Gada

« Le Mali et le Niger sont des pays d’importance stratégique inimaginable. Ils sont assis sur des réserves qui pourront projeter possiblement toute l’Afrique occidentale dans trois cent, quatre cent ans de prospérité » informe le Dr Folly Gada. Ces réserves sont l’eau, le gaz (pétrole) et les gisements d’or. Des guerres sont donc créées pour maintenir ces pays en périphérie pour mieux se servir.

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« Le projet (européen) de substitution de la dépendance en gaz vis-à-vis de la Russie a son épicentre au Niger », et concerne tous les pays de l’Union européenne, indique le Dr Folly Gada. C’est la raison pour laquelle il y a autant de bases militaires étrangères dans le pays. « Le Niger est devenu la base militaire des pays d’Europe » constate l’enseignant. Cette mobilisation de bases militaires dans le pays dévoile un plan d’installation à long terme.

Lors de son voyage en Chine le président français Emmanuel Macron avait fait des déclarations anti-américaines, indiquant que l’Europe sera autonome. En effet, depuis la suspension de livraison du gaz russe à l’Europe et le sabotage des gazoducs Nord Stream, l’Europe achète le gaz aux États-Unis à un prix très élevé. Les déclarations de Macron se basaient sur les vastes pays au Sahel dont la France estime disposer, et qui ont des réserves.

Aussi des lourds investissements sont en cours au Niger. Actuellement ,Il y a deux gazoducs en projet. Le premier est déjà financé à 60% et quitte le Niger traversant la Libye. L’autre va quitter le Niger, passera par le Nigéria, l’Algérie et finira sur les bords de la Méditerranée. Les deux sont destinés à alimenter l’Europe en gaz. En dehors du gaz, il y a l’or. « le Niger et le Burkina seuls font jusqu’à deux cent tonnes d’or par an » informe le Dr Folly Gada. C’est grâce à ces 2 pays plus le Niger que la France détient la 5eme réserve d’or au monde.

Aussi, la dénonciation des accords militaires par les nouvelles autorités du Niger « est une bombe dans toutes les capitales d’Europe. Parce que c’est un grand projet qui est remis en cause. C’est pourquoi tous ces États ne peuvent pas rester bras croisés. Ils ont juste besoin du quitus de la Cedeao pour engager un conflit ».

La Rédaction