Régime parlementaire : le Togo voudrait-il renouer avec son histoire?

Régime parlementaire - le Togo voudrait-il renouer avec son histoire?

Dans l’histoire du Togo, depuis son accession à la souveraineté internationale, un mode de gouvernance a toujours charmé le législateur ; il s’agit du régime parlementaire. Mais malheureusement, le pays n’a jamais vraiment eu l’occasion de mettre en œuvre ce mode de gouvernance pour l’éprouver.

Depuis le lundi 25 mars, le Togo frappe à la porte de la Vème République, suite à l’adoption par l’Assemblée nationale, d’une réforme constitutionnelle. Cette loi institue le régime parlementaire en lieu et place du semi-présidentiel sous lequel le pays est dirigé depuis des décennies. Le Chef de l’État Faure Gnassingbé, a demandé une deuxième lecture de la proposition de loi avant sa promulgation, suite aux divers réactions suscités dans l’opinion nationale.

Le régime parlementaire consacré par les indépendances

La constitution qui a vu l’indépendance du Togo en 1960, adoptée le 23 avril de la même année, consacrait un régime parlementaire dans le pays. Dans son article 10, il disposait que « le pouvoir exécutif appartient au Gouvernement qui assure la gestion des affaires publiques ». Cette disposition est appuyée par l’article 14 qui dispose que « le Premier ministre préside le conseil des ministres ».

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Il instituait aussi dans ses articles 6 et 7 l’équilibre entre les pouvoirs du cabinet ministériel et ceux du parlement, avec la responsabilité collective du gouvernement devant les députés et la possibilité pour le cabinet de dissoudre le parlement. Cette constitution a été l’œuvre exclusive de l’Assemblée nationale et du Gouvernement, sans passer par un référendum.

Cette constitution sera modifiée en 1961 par le premier président Sylvanus Olympio qui fait passer le Togo du régime parlementaire au régime semi-présidentiel, s’octroyant ainsi des pouvoirs élargis. Mais le régime parlementaire fera son retour dans la constitution togolaise, en faveur de la conférence nationale. Les dirigeants de cette transition qualifiée de démocratique, avaient jugé que ce mode de gouvernance serait mieux adapté que le semi-présidentiel.

Retour aux sources

Les dirigeants de la transition ont choisi un retour au régime parlementaire pour conduire cette période. L’Acte n°7 du 23 août 1991 portant loi constitutionnelle a prévu deux têtes dans l’exécutif : le Chef de l’État et le Premier ministre. Ce dernier se voit attribué plus de pouvoirs que le premier. Le président de la République avait des pouvoirs autonomes, notamment incarner « la continuité de l’État, l’indépendance et l’unité nationale », selon l’article 26, et des pouvoirs à l’exercice subordonnés, qu’il ne peut exercer sans l’intervention du Premier ministre.

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Quant au Premier ministre, il était le vrai chef du gouvernement, détenteur du pouvoir exécutif. Il désigne chacun des membres de son gouvernement, après avis favorable du Haut Conseil de la République, en vertu de l’article 34, et il préside le Conseil des ministres et dispose de la force armée, conformément à l’article 33. L’article 37 précisait qu’il « détermine et conduit la politique de la Nation ».

Il n’était pas non plus responsable devant le président de la République. Ces compétences, avait permis à Me KOFFIGOH, Premier ministre de transition, de refuser au Président de la République d’alors, feu Général Eyadéma, l’utilisation de l’avion présidentiel pour un voyage officiel. En dehors des législateurs, le régime parlementaire avait beaucoup de défenseurs, des sommités comme le feu Prof ATSUTSE AGBOBLI. Ce mode de gouvernance sera reconduit par la Constitution du 14 octobre 1992, introduisant quelques aménagements pour assurer une indépendance plus large au Premier ministre.

C’est donc de bonne guerre, que des députés ont introduit en fin d’année 2023, une proposition de loi qui consacre un retour à ce régime qui a été le choix des législateurs successifs au Togo. Le temps serait peut-être venu pour les Togolais d’expérimenter ce régime qui a été présenté à plusieurs reprises comme la solution aux insuffisances du régime semi-présidentiel, sans vraiment être mise en œuvre. La deuxième lecture demandée par le président Faure devrait parfaire cette loi, en tenant compte des critiques, pour qu’une fois réellement, le Togo éprouve les avantages de ce système qui ont présidé à son choix à travers les âges.

La Rédaction