L’ancien chef de guerre Roger Lumbala arrêté à Paris et a été mis en examen ce samedi 3 janvier 2021. L’ex chef du groupe rebelle RCD-N devra est désormais face à la justice après des années de cavale. Ainsi, ce lundi 4 janvier, le parquet antiterroriste français a confirmé son arrestation et sa mise en examen pour des crimes documentés par le rapport Mapping de l’ONU qui recense les crimes les plus graves commis en RDC entre 1993 et 2003.
Roger Lumbala a été mis en détention provisoire pour avoir participé, « en qualité de dirigeant » du Rassemblement congolais pour la Démocratie-Nationale (RCD-N) à l’opération « Effacer le tableau ».qui visait des populations civiles en Ituri entre juillet 2002 et janvier 2003. C’est ce qu’a précisé le communiqué du parquet antiterroriste français.
La primauté de l’imprescriptibilité des faits commis par Roger Lumbala au regard du droit international
Ce rapport pointe notamment qu’entre le 12 et le 29 octobre 2002, des éléments du RCD-N de Roger Lumbala et du MLC de Jean-Pierre Bemba ont tué au moins 173 civils nande et pygmées à Mambasa et dans les villages situés le long de l’axe Mambasa-Beni. Ces combattants se seraient livrés à des actes de cannibalisme, auraient mutilé un nombre indéterminé de civils, violé un grand nombre de femmes et d’enfants et commis des pillages généralisés. « Des victimes tuées sur la seule base de leur appartenance ethnique et accusés de soutenir un mouvement rival, le RCD-K-ML », précisait encore l’ONU.
L’ex-chef de guerre estime que la loi d’amnistie de 2014 a « effacé » ces faits au Congo et a permis « la réconciliation nationale ». Mais Eric Nsenga, coordonnateur national du Consortium de la société civile pour la promotion de la justice transitionnelle (CSCJT), met en avant l’imprescriptibilité des faits commis au regard du droit international.
« Au sujet de la loi sur l’amnistie évoquée par M. Roger Lumbala, nous pensons évidemment que ces crimes dénoncés relèvent des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre qui ont supériorité sur une amnistie qui n’est qu’une loi nationale », a-t-il expliqué. « Et vous savez que le crime contre l’humanité requiert une imprescriptibilité dans (son) traitement donc il n’y a pas de délai », a-t-il insisté.
« On ne peut pas, dans la hiérarchie des normes juridiques, considérer une loi nationale au-dessus d’une loi internationale et tant que ces crimes sont reconnus au niveau international, il est important que ces crimes soient poursuivis, peu importe le délai de leur commission, parce qu’ici ils sont imprescriptibles », a-t-il affirmé.
Roger Lumbala arrêté, un fait salué par les Nations unies
Pour Abdoul Aziz Thioye, directeur du bureau des Nations unies aux droits de l’Homme en RDC, c’est un premier pas vers la fin de l’impunité, mais il ne faut pas s’arrêter : « Une procédure judiciaire à l’encontre de Roger Lumbala est un signe très encourageant, dans la bonne direction, celle de la lutte contre l’impunité et les crimes graves commis en RDC, notamment à l’Est. Mais je pense qu’il faut le souligner, il est extrêmement important que justice puisse se faire », a-t-il indiqué.
Abdoul Aziz Thioye affirme que d’autres États doivent agir comme la France contre les criminels de guerre : « Il ne saurait exister aujourd’hui de sanctuaire pour les criminels de guerre ». « L’action qui a été menée par les Français a été initiée en vertu de la compétence universelle dont les juridictions françaises se sont saisies. Il y a d’autres pays qui ont le même type de compétence en ce qui concerne les crimes des catégories des crimes internationaux qui devraient pouvoir faire la même chose, à chaque fois qu’un auteur présumé cité dans le rapport pourrait se retrouver sur son territoire »,a-t-il ajouté.
Pour le directeur du bureau des Nations unies aux droits de l’Homme en RDC, c’est aussi un message envoyé aux groupes armés : « Je pense que c’est un signe très encourageant, un signal qui est envoyé à tous les chefs des groupes armés encore très actifs, qui sèment la mort et la désolation contre les populations innocentes, mais aussi (à) certains officiers des FARDC, pour leur faire comprendre en réalité que la justice tôt ou tard pourra les rattraper », a affirmé Abdoul Aziz Thioye.
Il se dit espérer que « d’autres actions contre d’autres auteurs présumés congolais ou étrangers vont suivre ».
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