La magistrate gambienne Fatou Bensouda passe le relais, ce mercredi 16 juin au britannique Karim Khan. C’est sur une note diversement appréciée. Le bilan de Fatou Bensouda à la CPI ne correspond pas à l’objectif de son élection, c’est-à-dire réconcilier l’Afrique avec la CPI.
Après un mandat de 09 ans à la tête de la CPI, Fatou Bensouda laisse un mauvais souvenir de la Cour Pénale Internationale aux africains.
Fatou Bensouda, rejetée par les africains
La procureure de la CPI élue, en 2011, a créé la défiance des États africains vis–à-vis de la cour. Cette dernière est vue comme le bras judiciaire de politiques occidentales sur le continent. Pour l’analyste et homme politique sénégalais, Adama Gaye, « la Cour pénale internationale a fait plus de show, plus de procès spectaculaires. Mais à l’arrivée, elle fait juste toujours chou blanc ».
Selon l’analyste, sous Fatou Bensouda les griefs à l’endroit de la Cour pénale internationale (CPI) sont les mêmes partout en Afrique. Elle est accusée de n’avoir jusqu’ici poursuivi que des africains, poursuites conclues souvent par des échecs. Et les exemples sont légion. Acquittements pour l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo et le Congolais Jean-Pierre Bemba. Et puis non-lieu pour le président kényan Uhuru Kenyatta.
Ces échecs démontrent des choix de poursuites sans fondement de la cour. Ce qui fait dire à Adama Gaye : « l’élan, l’enthousiasme qu’il y avait autour de la Cour pénale internationale est retombé. Il ne manque pas d’entité ou d’Etat qui s’oppose à elle. Madame Bensouda, après neuf ans de présence à la tête du parquet de la Cour, ne part pas avec un bilan élogieux ».
De plus, au cours de son mandat, Fatou Bensouda s’est rarement rendue sur les sites de crimes, sauf en fin de mandat, son déplacement sur le Darfour. Ceci, dans le cadre du mandat d’arrêt pour génocide émis il y a plus de dix ans contre l’ex-président Omar el-Béchir.
Un travail sous pression
C’est la situation même de la Cour qui justifie, pour certains, ce manque d’efficacité de la procureure. En effet, selon maître Mamadou Ismaïla Konaté, avocat et ancien ministre de la Justice du Mali « quand on prend en compte la nature de la juridiction, quand on prend en compte la situation des difficultés à laquelle était exposée cette juridiction qui ne lui ont pas donné l’occasion d’être autonome, bien évidemment on peut avoir l’impression que le bilan est mitigé… »
Les fortes pressions exercées par les Etats Unis sur la CPI, alors même que, ce pays n’est pas signataire du statut de Rome fondant la juridiction internationale, vont aussi rendre la tâche difficile au successeur de Fatou Bensouda. Et Adama Gaye soutient cette thèse quand il affirme qu’« on ne peut pas s’attendre à ce que le nouveau procureur, Karim Khan, puisse faire mieux que Fatou Bensouda… ».
Mais avant de partir, comme pour contrer les attaques, Fatou Bensouda a ouvert de nouvelles enquêtes loin de l’Afrique dont trois lourds dossiers. La Cour enquête désormais sur les crimes commis dans les Territoires palestiniens occupés, en Afghanistan et en Géorgie. Des faits impliquant la Russie, les États-Unis et Israël.
Toutefois, aucun mandat d’arrêt émis à ce jour ne cible de suspects hors du continent africain.
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Esso A.