Religion et politique en Afrique : un mariage consommé au Burkina Faso, mais difficile en RDC

La religion a fait depuis quelques temps, une percée dans la politique en Afrique. En effet, les confessions religieuses sont de plus en plus sollicitées pour apporter un consensus parmi les hommes politiques qui ont du mal à s’entendre. Les cas du Burkina et de la RDC sont parlants. Mais il convient de se demander si ce choix constitue la panacée.

Au Burkina, au bout de plusieurs mésententes, le choix a finalement été porté sur le candidat de l’église catholique comme président de la CENI, chargée d’organiser les élections. Par contre, la situation est plus compliquée en RDC où 8 chefs de confessions religieuses différentes peinent à désigner le président de la CENI.

Un candidat de l’Eglise catholique à la place d’un musulman

Le Burkina semble être un bon élève de la fusion entre religion et politique en Afrique. Les confessions religieuses prennent l’habitude d’organiser les élections dans ce pays. Ceci au nom d’une règle non écrite, qui veut que la présidence de l’institution en charge des élections soit tournante, entre les membres des différentes communautés religieuses qui siègent à la CENI.

Ainsi, après la communauté protestante avec le regretté, Moussa Michel Tapsoba et catholique avec Me Barthélemy Keré, la communauté musulmane, représentée par Newton Ahmed Barry, a dirigé la CENI depuis 2016. Et ce 29 juillet 2021, un nouveau candidat a été élu au nom de l’Eglise catholique.

Mais cette élection n’a pas été de tout repos, puisque c’était le tour de la chefferie coutumière de présenter un candidat. Mais ledit candidat a été récusé par l’opposition qui estime qu’il est un militant du parti au pouvoir. Ce qui pourrait entamer la crédibilité et la transparence des prochaines élections. Il a fallu l’intervention du chef de l’Etat Roch Marc Christian Kaboré auprès de la chefferie coutumière pour qu’elle renonce à sa candidature au poste du président de la CENI.

Comme quoi la casquette religieuse n’est pas gage de bonne foi quand on fait de la politique en Afrique.

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L’Echec des confessions religieuses en RDC

La République Démocratique du Congo consacre le divorce entre la religion et la politique en Afrique. En effet, Depuis 2006, le chef de la CENI est désigné sur recommandation des confessions religieuses. Cependant les huit confessions religieuses dont leur chef sont réunis dans une plateforme chargée de la désignation, ont du mal à s’entendre.

En juillet 2020, ce processus avait abouti à la désignation de Ronsard Malonda réputée proche de l’ex-président Joseph Kabila. Le processus avait dégénéré et des manifestations avaient eu lieu à travers la RDC. Relancé en mars 2021, le processus a toujours du plomb dans l’ail. Au point où six des 8 chefs religieux ont fait scission et annoncé qu’ils étaient parvenus à un consensus sur la personne qui devrait diriger la commission électorale. Dans le but disaient-ils de respecter le deadline imposé par l’Assemblée nationale.

Mais l’Eglise catholique qui a présidé la séance initiale s’est dite non concernée par ce choix. Les travaux ont repris ce vendredi 30 juillet mais la fumée blanche n’est toujours pas sortie. Un rapport commun a été remis au président de l’Assemblée nationale Christophe Mboso, pour expliquer les raisons de leurs désaccords. Mais les 6 sécessionnistes ont présenté leur propre candidat.

La politique en Afrique, orpheline de repères éthiques

Si la politique en Afrique, est faite, de suspicions et de coups bas, la religion n’est pas épargnée. Les choix controversés de la plateforme religieuses en RDC, occasionnant des manifestations avec mort d’hommes, en est l’exemple. Au Burkina également, des pressions ont été exercées pour empêcher une confession religieuse de présenter son candidat, sous prétexte d’accointance avec le parti au pouvoir.

La méfiance est donc contagieuse. Même si le candidat est désigné par un organe religieux, sa bonne foi est toujours remise en cause. La politique en Afrique n’est donc pas prête à s’accommoder à la religion. En outre, en RDC, les religieux ont dénoncé des pressions et menaces de toute part. Ce qui signifie que le respect que peut inspirer un religieux, n’a plus droit de citer quand on fait de la politique en Afrique.

La religion et la politique en Afrique ne font pas forcément bon ménage face aux velléités de l’un d’inféoder l’autre. Et les exemples sont patents sur tout le continent africain.

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Esso A.